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L’interdisciplinarité et la terminologie mathématique
Les termes migrateurs


Cristina Alice Toma
Université de Bucarest/ Université de Genève
 

 
 

De nos jours, les problèmes de la science se trouvent au croisement des disciplines ou des domaines différents, ainsi que leurs réponses font appel aux connaissances interdisciplinaires ou transdisciplinaires. Face aux grandes questions, les scientistes, poussés par le besoin d’exactitude, cherchent des piliers pour leurs théories dans des modèles déjà existants. Est-ce que les mathématiques pourraient répondre à cette nouvelle tendance ? Pourquoi le discours mathématique est capable, par sa forme, d’interdire le refus de son contenu ? Le terme mathématique transgresse son domaine ? Quelles sont les propriétés qui favorisent la migration ?


 
 

La communication constitue le mot-clé de l’époque actuelle. De nombreuses sciences rendent compte de différents aspects de la communication. L’enjeu de la terminologie est de fournir des termes mono- référentiels et mono- sémantiques susceptibles de réaliser la communication sans reste que la science exige.

Il existe – d’une parte – des champs d’étude qui font l’objet de la recherche de plusieurs domaines scientifiques et qui permettent l’apparition des termes scientifiques interdisciplinaires. D’autre part, les sciences, pour perfectionner leurs instruments d’investigation, s’approprient des méthodologies qui appartiennent à d’autres sciences. Dans le cas des mathématiques il s’agit de ce qu’on appelle la mathématisation des sciences (par exemple, des sciences du langage). Voilà deux types de migration de termes scientifiques que l’on va analyser dans cet article. On va examiner les termes scientifiques interdisciplinaires ayant comme trait commun le fait que tous appartiennent au domaine des mathématiques [1]. On va établir les domaines dans lesquels on retrouve le même terme, mais aussi la direction de la migration et la tendance générale de transfère d’un domaine à l’autre en essayant de montrer l’existence des classes spécifiques des termes « émigrants » ou « immigrants » et la préférence des termes pour un domaine ou un autre ; on va établir aussi la préférence pour un domaine ou un autre d’être l’origine ou la cible de la migration.

On va distinguer les contacts profonds entre les domaines, qui se reflètent au niveau du lexique dans l’existence des termes interdisciplinaires mono- sémantiques (phénomène qu’on va appeler interdisciplinarité ou migration totale) et les contacts superficiels entre différents domaines, fait qui renvoie aux termes dont la caractérisation de mono- sémantique est difficile à défendre (phénomène qu’on va appeler interférence ou migration partielle) [2].

La méthodologie qu’on va adopter pour étudier ces phénomènes combine des méthodes d’analyse du discours, de lexicologie et de sémantique. On va utiliser le dictionnaire pour établir le corpus, une démarche de va-et-vient entre la sémasiologie et l’onomasiologie pour envisager les phénomènes sémantiques qui accompagnent la migration et l’analyse du discours pour examiner le co-texte (linguistique) et le contexte (non- linguistique) qui permettent la migration.

On va présenter, tour à tour, le corpus ; les domaines que les termes mathématiques traversent et, finalement, les particularités sémantiques et co-textuelles des termes migrateurs.


1.Les termes migrateurs et les domaines de leur circulation
 

Le corpus est construit suite à la consultation du dictionnaire dans lequel on repère les indicateurs du domaine qui sont soit explicitement présents, soit récupérés à partir du sens (définition lexicographique) enregistré dans l’ouvrage consulté [3]. Le mot accepté dans la base de données à analyser doit appartenir au moins à deux domaines ; ou, autrement dit, une entré lexicale constitue un terme interdisciplinaire ou migrateur si et seulement si le mot comprend un sens à double indicateur de domaine (enregistré ou récupéré). La double ou multiple appartenance est le résultat du passage d’un terme d’un domaine vers l’autre ; le mouvement est orienté principalement en fonction de divers facteurs de nature extra- linguistique parmi lesquels l’intérêt d’une certaine discipline pour un objet d’étude d’une autre discipline ou le transfère méthodologique d’un domaine à l’autre. Mais il existe aussi des facteurs de nature linguistiques qui peuvent déterminer la multiplication d’usage lexicale des termes mathématiques, comme : la précision du sens (mono- sémantisme), la sémiotique iconique associée à un terme mathématique. Si les facteurs d’environnement cognitif sont chronologiques ou successifs, les facteurs linguistiques impliquent des chaînes causales qu’on peut décrire en amont du phénomène étudié ou envisager en aval de celui-ci.

Le phénomène de migration des termes fait partie du phénomène plus général d’hétérogénéité et de transversalité du discours scientifique « circulant » [4] qui convient aux hypothèses initiales de Michel Foucault, qui écrivait : « Au lieu d’être une chose dite une fois pour toute […] l’énoncé, en même temps qu’il surgit dans sa matérialité, apparaît avec un statut, entre dans des réseaux, se place dans des champs d’utilisation, s’offre à des transferts, à des modifications possibles, d’intègre à des opérations et à des stratégies où son identité se maintient ou s’efface. » (Foucault, 1969 : 138) [5].

En particulier, par le fait qu’on part dans notre analyse des termes mathématiques, le phénomène de migration est d’autant plus intéressant parce qu’il contredirait l’intuition conforme à laquelle les mathématiques, sont considérées, en général, comme science « fermée, ésotérique » (v. Candel, 1998 :46), comme science moins ouverte à la vulgarisation : « La communauté scientifique mathématique pourrait constituer un bon exemple de communauté à faible impact discursif externe » (Beacco, 2001 :20). Notre analyse de l’impact terminologique interdisciplinaire des termes mathématiques se réalise en deux temps : dans un premier temps, on retient toutes les entrées lexicales qui contiennent plusieurs indicateurs de domaines dans leurs définitions, entrées susceptibles d’être termes interdisciplinaires (migrateurs) ; dans un deuxième temps, on distingue les termes vraiment migrateurs des termes appelés partiellement migrateurs .

L’interdisciplinarité des termes mathématiques – dans un premier temps – s’avère riche aussi par le nombre des termes interdisciplinaires, que par le nombre des domaines dans lesquels on retrouve des termes mathématiques.

Domaine [6] est le concept par rapport auquel on définit le terme interdisciplinaire ou migrateur. Dans un sens large, domaine représente le champ du savoir humain ; en fonction de l’objet de connaissance qui a ou n’a pas de relation de continuité avec l’homme en tant que corps, en tant qu’objet de la nature, il existe la distinction entre deux domaines : les sciences de la nature et les sciences exactes, d’un côté, et les sciences humaines, de l’autre. Dans un sens restreint, un domaine constitue une discipline ou une science particulière (caractérisée par un objet et une méthodologie spécifique d’étude) et son lexique. Cette dernière acception est retenue dans cette étude ; le domaine lui- même est parfois divisé en sous- domaines ; on utilise la délimitation en domaines offerte dans les ouvrages lexicographiques par le biais d’indications pour les langues de spécialité auxquelles on apporte quelques précisions. Les indicateurs de domaines précisent le champ de l’usage d’un terme, mais ils mélangent les domaines et les sous- domaines et le phénomène de migration, qui présuppose la transgression d’une limite de domaine, est estompé, il devient difficile à saisir. Ainsi, dans le cas des indicateurs qui correspondent aux domaines strictement délimités, la migration d’un terme est facile à démontrée par l’intermède de la lecture de ces indicateurs divers qui accompagnent un même terme ; dans le cas d’indicateurs qui permettent l’inclusion d’un domaine dans l’autre ou l’intersection des domaines différents, le phénomène de migration devient difficile à saisir à partir de l’information des indicateurs lexicographiques et, par conséquent, l’interprétation de ceux-ci doit se réaliser à l’aide d’une information supplémentaire tirée de l’analyse du sens du terme. Il faut établir s’il est le cas d’une migration d’un sous- domaine à l’autre à l’intérieur du domaine auquel l’indicateur lexicographique correspond ou s’il n’est que le cas d’une information moins forte que l’ouvrage lexicographique nous donne pour le terme analysé dont l’appartenance à un sous domaine pourrait être strictement précisée.

En effet, la délimitation des domaines est très importante pour décrire ensuite la migration des termes, leur interdisciplinarité. L’organigramme suivant nous montre la répartition aléatoire des indicateurs lexicographiques par rapport aux domaines :

Fig. 1

Ainsi, si A est le domaine du savoir ; a, b, … représentent les domaines et , ß, …sont des sous- domaines, les indicateurs « de domaine » se placent au niveau des ensembles a, b, …, et aussi au niveau des ensembles , ß, … Cette répartition dispersée des indicateurs empêche une bonne description de la migration, étant donné qu’un terme x est migrateur ou interdisciplinaire s’il respecte une des formules suivantes :

 

Quels que soient deux ou plusieurs domaines distincts, un terme est migrateur s’il appartient à l’intersection d’au moins deux d’entre eux.

Quels que soient deux ou plusieurs domaines ou sous- domaines distincts, un terme est migrateur s’il appartient à l’intersection d’au moins deux d’entre eux et si le sous- domaine n’est pas inclus dans le domaine d’intersection.

Parfois, les indications de langue de spécialité comprennent le domaine et quelques sous- domaines : GRAM LING ou PHON LING (il manque ici des sous- domaines comme : sémantique, lexicologie, pragmatique, stylistique, etc.). Le même mélange de domaines et sous- domaines est enregistré dans les séries :

-ANAT – BIOL – BOT – EMBRYOL – GENET;
-COMPTA – ECON – FIN.

Si un terme comme temps a l’indicateur LING et comme l’on sait que la linguistique comprend plusieurs sous- domaines, une partie d’entre eux comptés comme indicateurs lexicographiques, on a de bonnes raisons de se demander si le comportement de ce terme à l’intérieur du domaine linguistique est ponctuel (pourquoi il n’a pas un indicateur de sous- domaine comme GRAM, présent d’ailleurs parmi les indicateurs ?) ou multiple, récursif d’un sous- domaine à l’autre. Évidemment, le terme linguistique temps n’a qu’un seul sous- domaine où il est utilisé, mais l’indicateur lexicographique permet quand même une telle question, d’autant plus si l’on trouve à côté de lui des termes dont le comportement répond positivement à la même question : système, unité, valeur.

Les domaines en tant que macro- contexte détermine le phénomène de migration (v. 2.).


2.Domaines scientifiques et migration des termes mathématiques
 

Il suffit de regarder la liste des domaines dans lesquels on rencontre des termes mathématiques (v. Annexe 1) pour se rendre compte de leur omniprésence. Pourquoi les mathématiques ? Parce que les mathématiques, en tant que discours, mais aussi en tant que méthode de recherche assurent l’exactitude des résultats et constituent un modèle pour les autres sciences. (N’oublions pas que ce fait n’est qu’une hypothèse.)

En décrivant la réalité, les sciences s’approprient des objets communs, mais la perspective d’étude est différente. Au niveau du lexique, cet aspect se reflète dans l’existence des termes dont la référence unique est reliée aux différents domaines ; autrement dit : les termes interdisciplinaires sont le résultat d’une double ou multiple connexion à la même référence :

Fig. 2

soit s’il est le cas d’un terme dénominateur d’un objet, soit s’il est le cas d’un terme dénominateur d’un instrument d’étude. La relation linguistique – extra- linguistique est inhérente au niveau du lexique . Si l’objet et les instruments font lieu commun des deux sciences (pour notre analyse, les mathématiques et un autre domaine), alors l’ensemble des termes communs est plus nombreux :

physique – 80 termes communs avec les mathématiques ;
technique – 46 termes communs avec les mathématiques ;
économie – 30 termes communs avec les mathématiques ;
astronomie – 28 termes communs avec les mathématiques ;
logique – 27 termes communs avec les mathématiques ;
chimie – 26 termes communs avec les mathématiques ;
géographie – 26 termes communs avec les mathématiques ;
médecine – 23 termes communs avec les mathématiques ;
biologie – 22 termes communs avec les mathématiques ;
droit – 20 termes communs avec les mathématiques ;
politique – 18 termes communs avec les mathématiques ;
militaire – 17 termes communs avec les mathématiques ;
linguistique – 16 termes communs avec les mathématiques ;
musique – 15 termes communs avec les mathématiques ;
anatomie – 14 termes communs avec les mathématiques ;
art – 14 termes communs avec les mathématiques ;
géologie – 9 termes communs avec les mathématiques ;

Si ce qui vient dans l’intersection des deux sciences fait partie seulement du savoir commun de celles-ci (exceptant leur méthodologie), alors le nombre des termes communs est petit :

biochimie – anaglyphe ;
embryologie – disque ;
finance – valeur ;
génétique – condition ;
histologie – disque ;
industrie - disque ;
médecine – analyse ;
mécanique – dynamique ;
phonétique – fréquence ;
transport – adhérence ;
urbanisme – construction ;
zoologie – couronne .

Une explication linguistique du phénomène de la migration est donnée par la sous- catégorisation sémantique des termes mathématiques interdisciplinaires : des objets concrets, des objets abstraits, des processus, des phénomènes, des états. Les domaines qui combinent plusieurs sous- catégories sémantiques des termes, contiennent plusieurs éléments communs avec un autre domaine, tandis que pour les domaines qui prennent des termes appartenant à quelques sous- catégories sémantiques, les éléments de leur intersection sont moins nombreux. Le critère quantitatif (type de la catégorie) se combine avec le critère quantitatif (nombre des catégories) pour déterminer la richesse des termes de l’intersection des deux ou plusieurs domaines.

La sous- catégorie sémantique la plus productive pour les termes mathématiques interdisciplinaires est l’objet concret et, parmi les objets concrets, surtout ceux dont la sémiotique relève des aspects « dimensionnels ».

Le domaine dont l’intersection avec les mathématiques est la plus large est la physique. Les termes que les deux sciences possèdent en commun dénomment :

des objets concrets : arc, axe, champ, corde, corps, parallélogramme, plan, prisme ;

des objets abstraits : équations, énergie, facteur ;

des processus et des phénomènes : accélération, amplification, analyse, oscillation, transformation ;

des états : équilibre, stabilité, cohérence.

Le fait que les mathématiques et la physique ont beaucoup de termes communs s’explique au niveau extra- linguistique par un champ d’analyse commun et au niveau linguistique par la variété des sous- catégories sémantiques. Quant à l’origine des termes, l’accessibilité sémantique des termes permettrait d’affirmer qu’il y a des termes qui partent de la langue commune (ceux qui appartiennent à la première sous- catégorie sémantique), des termes qui ont comme origine les mathématiques (les objets abstraits) ou la physique (les termes des deux dernières sous- catégories sémantiques.

Les termes qui appartiennent en même temps aux mathématiques et à la linguistique ont une distribution pareille aux termes communs aux mathématiques et à la physique en classes sémantiques :

des objets concrets : centre, champ, point, racine ;

des objets abstrait : complément, conjonction, déterminant, hyperbole, unité ;

des processus e t des phénomènes : analyse, relation ;

des états : cohérence, transitivité.

Il parait que la sous- catégorie sémantique est plus forte comme facteur qui détermine la richesse d’une intersection entre deux domaines par rapport au type de domaines concernés.

Les deux premières classes sémantiques de termes se retrouvent aussi dans les domaines qui contiennent un nombre moins nombreux de termes communs avec les mathématiques : géographie (axe, centre, cercle, champ, facteur,forme) ou musique (forme, imagine, espace, temps, valeur).

Quand l’intersection des deux domaines se réduit à un seul élément, celui-ci peut être placé arbitrairement dans une des classes sémantiques mentionnées : des objets concrets (disque, cylindre, couronne, corde) ; des objets abstraits (condition) ; des processus, des phénomènes, des états (analyse, adhérence, dispersion) (v. Annexe 2).


3. Macro- interdisciplinarité et micro- interdisciplinarité
 

Il y a deux façons de concevoir l’interdisciplinarité : soit à partir d’un domaine pour lequel on cherche les contacts avec d’autre domaines (macro- interdisciplinarité ou migration globale), soit à partir d’un termes pour lequel on regarde le parcours d’un domaine à l’autre (micro- interdisciplinarité ou migration locale).

En analysant des termes qui passent d’un domaine à l’autre on obtient une échelle qui contient les termes à partir des ceux les plus migrateurs jusqu’aux ceux moins migrateurs :

15 domaines : corps ;
14 domaines : analyse, centre ;
10 domaines : base, courbe ;
9 domaines : disque, forme ;
8 domaines : cône, contrôle, couronne, unité ;
7 domaines : aire, cercle, condition, valeur ;
6 domaines : cylindre, champ, classe, corde, direction, distance, pyramide, place, vitesse ;
5 domaines : équilibre, élément, facteur, fluxe, image, espace ;
4 domaines : absorption, axe, code, complément, construction, continuité ;
3 domaines : amplification, anaglyphe, arc, argument, conclusion, conjonction ;
2 domaines : affixe, algorithme, axiome, calcul, cohérence.

Du point de vue sous- catégoriel sémantique les dix premiers termes ont une répartition non- homogène : des objets concrets (corps, centre, base, courbe, cône, couronne) ; des objets abstraits (contrôle, unité) ; des processus, des phénomènes, des états (analyse, dynamique).

Au niveau de la macro- interdisciplinarité mais aussi au niveau de la micro- interdisciplinarité, les termes qui occupent une position scalaire plus haute sont ceux qui appartiennent à la sous- catégorie sémantique des objets concrets, contrairement à l’hypothèse intuitive qui pourrait soutenir une degré plus élevé de circulation des termes abstraits dans les sciences ; on constate une préférence accentuée pour les termes de la langue commune et non pas pour ceux dont l’origine est strictement scientifique.


4. La migration des termes scientifiques et le co- texte
 

4.1. L’actualisation du sens des termes mathématiques interdisciplinaires est, dans certains cas, indépendante du co- texte (linguistique) : il suffit d’avoir entendu en parlant des mathématiques un terme comme algorithme, cône, fascicule, variable pour saisir le concept correspondent.

La migration des termes indépendants est restreinte, à quelques exceptions près : dynamique (10 domaines) ; disque (9 domaines) ; densité (6 domaines), image (6 domaines), fait du a une spécialisation forte des termes qui ne permet l’utilisation de ces termes que dans le domaine des mathématiques. Si le terme mathématique indépendant transgresse son domaine, il doit se contenter, en général, dans un autre domaine, d’une utilisation dont le sens est différent (il s’agit de la polysémie ou même de l’homonymie) : absorption, calcul, groupe, rapport, segment, unité. Par exemple, calcul (1) (« mise en œuvre des règles élémentaires d’opération (addition, soustraction, multiplication, division) sur les nombres. ») est homonyme avec calcul (2) (« MED. concrétion pierreuse qui se forme dans divers organes (vessie, reins, vésicule biliaire, etc. »). Il n’y a que quelques termes interdisciplinaires qui gardent leur sens indépendant dans le passage d’un domaine à l’autre et ce fait n’est valable que pour quelques domaines (logique, linguistique, philosophie, physique, astronomie).

4.2. Pour certains termes l’existence d’un co-texte syntagmatique pour la récupération du concept est nécessaire (analyse mathématique, forme trigonométrique, système d’équations, structure algébrique, unité imaginaire, valeur numérique) ou facultative (complément (d’un angle), dimension (d’un espace linéaire)).

L’absence du mono- sémantisme [9] du mot – base de la syntagme déclanche la nécessité d’actualisation du syntagme entier pour récupérer le concept. Parmi les termes qui peuvent être utilisés soit indépendamment, soit dans des syntagmes, la plus grande partie garde un sens tout le longue de leur utilisation, les autres change leur sens dans le passage de l’indépendance à la dépendance co- textuelle. Par exemple, le terme équation, qui a le sens « égalité qui n’est vérifiée que par certaines valeurs attribuées aux inconnues » (DNT) garde le sens dans les syntagmes, les mots ajoutés ne réalisent qu’une classification, une typologie des équations : équation différentielle, équation d’une courbe, équation du temps, équation personnelle.

Les termes qui font partie de la sous- catégorie sémantique des objets concrets et qui garde leur sens de l’utilisation individuelle sont susceptibles d’une production riche de syntagmes : fonction (MATH – fonction réelle d’une variable réelle, fonction complexe d’une variable réelle, fonction algébrique, fonction numérique, fonction du premier degré, fonction du deuxième degré, fonction logarithmique, fonction transcendante ; (AD M) – fonction publique, fonction publique territoriale ; PHYS – fonction de nutrition, fonction de reproduction, fonctions digestives ; CHI M – fonction acide, LING – fonction dénotative ; GRAM – fonction syntaxique ; LOG – fonction propositionnelle ; ECON – fonction de production, fonction commerciale) ; cercle (MATH – grand cercle d’une sphère, petit cercle, cercle d’Euler ; ASTRO – cercle de hauteur, cercle horaire d’un astre, cercle méridien ;BOT – cercle annuel ; PHYS – cercle oculaire ; TECH – vin en cercles ; LOG – cercle vicieux ; (SOCIOL) – cercle de famille, cercle d’études ; (SPORT) – cercle sportif ; (POL) – cercle politique ). Les termes qui appartiennent aux autres catégories sémantiques donnent naissance à un nombre réduit de syntagmes : algorithme (algorithme d’Euclide).

L’absence de l’homonymie [10] dans le langage de spécialité, est à l’origine de la manifestation rare du phénomène de changement de sens du terme- base d’un syntagme : base, champ, classe, complément, corps, facteur. Par exemple, le sens du terme seul facteur : « chacun des nombres figurant dans un produit » est différent du sens qu’il prend dans le syntagme facteur premier d’un nombre : « nombres premiers, distincts ou non, dont le produit est égal à ce nombre. (Un nombre admet une décomposition unique en facteurs premiers). ».

Quant au phénomène de migration des syntagmes, aucun syntagme mathématiques n’est pas utilisé tel quel dans un autre domaine. Le terme- base peut émigrer, mais il devient base pour de nouveaux syntagmes. Par exemple, facteur aide à la construction des syntagmes : facteur de puissance (physique) ou facteur général (psychologie).


5.Conclusions
 

Contrairement à l’hypothèse initiale les termes qui réalisent une macro- interdisciplinarité ou une micro- interdisciplinarité plus riche sont des termes qui dénotent des objets concrets et non pas des objets abstraits.

Entre les divers domaines il y a beaucoup de contacts, mais l’interdisciplinarité ou la migration totale est assez réduite, le passage d’un terme d’un domaine à l’autre est en général accompagné soit d’un changement partiel de sens (polysémie), soit d’un nouveau co- texte, l’ancien terme devient la base d’un nouvel syntagme. Parfois le changement de sens est radicale (on se pose même la question s’il s’agit toujours d’un même terme) et une seule forme lexicale couvre deux concepts totalement différents, distincts (homonymes).


Bibliographie
 

1.BIDU-VRANCEANU, ANGELA (2000) – Terminologiile stiintifice din perspectiva interdisciplinara, în AUB;

2.BIDU-VRANCEANU, ANGELA ; TOMA, ALICE (2000) – Lexic comun, lexic specializat, EUB, Bucuresti;

3.BIDU-VRANCEANU, ANGELA; TOMA, ALICE (2001) – Lexic stiintific interdisciplinar, EUB, Bucuresti;

4.CANDEL, DANIELLE et LEUJEUNE, DANIELLE (1998) – Définir en mathématiques. Regards lexicographiques sur des textes de mathématiques, in Cahiers de lexicologie, p.43-60;

5.FOUCAULT, MICHEL (1969) – L’archéologie du savoir, Gallimard, Paris ;

6.KLEIBER, GEORGES (1999) – Problèmes de sémantique. La polysémie en questions, PUS;

7.KOCOUREK, ROSTISLAV (1991) – La langue française de la technique et de la science, 2 ed., Wiesbasen/ Paris, Brandstetter Verlag/ La documentation française;

8.LERAT PIERRE (1995) – Les langues spécialisées, PUF, Paris;

9.MARCUS, SOLOMON (1970) – Poetica matematica, ES, Bucuresti;

10. REY, ALAIN (1979) – La terminologie, PUF, Paris;

11.ROULET, EDDY ; FILLIETTAZ, LAURENT ; GROBET, ANNE (2001) – Un modèle et un instrument d’analyse de l’organisation du discours, Peter Lang, Editions scientifiques européennes ;

12.STOICHITOIU, ADRIANA (1990) – Sens si definitie în limbajul juridic, în SCL, XVI, nr.4.

13.STOICHITOIU, ADRIANA (2001) – Semiotoca discursului juridic, EUB, Bucuresti.


Annexe 1
Domaines et indications de vocabulaire de spécialités dans le dictionnaire
 
1.agriculture > AGR 36.liturgie >LITURG
2.algèbre > ALG 37. logique > LOG
3.anatomie > ANAT 38. mathématiques > MATH
4.architecture > ARCHI 39.mécanique > MECA
5.art > ART 40.médecine > MED
6.astronomie > ASTRO 41.métallurgie > METAL
7.automobile > AUTO 42.météorologie > METEO
8.aviation > AVIAT 43.métrologie > METROL
9.biochimie > BIOCHIM 44.militaire > MILIT
10.biologie > BIOL 45.musique > MUS
11.botanique > BOT 46.pédagogie > PEDAG
12.chimie > CHIM 47.pédologie > PEDOL
13.cinéma > CINE 48.pétrochimie > PETROCHIM
14.comptabilité > COMPTA 49.philosophie > PHILO
15.construction > CONSTR 50.phonétique > PHON
16.cuisine > CUIS 51.photographie > PHOTO
17.droit > DR 52.physique > PHYS
18.économie > ECON 53.physiologie > PHYSIOL
19.électroacoustique> ELECTROACOUST 54.politique > POLIT
20.électronique > ELECTRON 55.psychologie > PSYCHO
21.embryologie > EMBRYOL 56.religion > RELIG
22.finance > FIN 57.sciences naturelles > SC NAT
23.génétique > GENET 58.sociologie > SOCIOL
24.géographie > GEOGR 59.sport > SPORT
25.géologie > GEOL 60. statistique > STATIS
26.grammaire > GRAM 61.technique > TECH
27.histiore > HIST 62.télécommunications> TELECOM
28.histologie > HISTOL 63.théâtre > THEAT
29.hydrologie > HYDROL 64.topographie > TOPOGR
30.ichtyologie > ICHTYOL 65.transport > TRANSP
31.imprimerie > IMPRIM 66.trigonométrie > TRIGO
32.industrie > INDUSTR 67.typographie > TYPO
33.informatique > INFORM 68.urbanisme > URBAN
34.linguistique > LING 69.viticulture > VITIC
35. littérature > LITTER 70.zoologie > ZOOL




Annexe 2
Termes mathématiques interdisciplinaires
 

1.physique :

absorption, accélération, amplification, analyse, arc, axe, caractéristique, centre, champ, corde, cohérence, cône,constante, continuité, corrélation,corps, couple, courbe, densité, dimension, dynamique,disque, discontinuité, dispersion, distance, divergence, domaine, équilibre,équation, élément, énergie, entropie, événement, expérience, facteur, fascicule, fluxe,force, fréquence, génératrice, grade, imagine, impulse, indice, induction, mutation, oscillation, parallélogramme, période, phase, philtre, plan, pole, pulsation, point, rendement, rayon, réseau, résonance, scalaire, stabilité, transformation, translation, unité, vecteur, verseur, vibration, vitesse, volume, zone ;

2.technique :

adhérence, amplification, area, axe, calotte,caractéristique, centre, cylindre, classe, constante, construction, cote, courbe, dynamique, direction, disque, distribution, division, écher, élément, excentricité, facteur, forme, hélice, indicateur,injection, norme, philtre, plan, rendement, réaction, rectification, repère, réseau, segment,système, temps, vitesse ;

3.économie :

analyse, base, centre, concurrence, construction, contrôle, correspondance, cote, courbe, division, équilibre, facteur, fluxe, force, indice, ligne, norme, opération, processus, rendement, répartition, rotation, structure, unité, valeur, variable, volume ;

4.astronomie :

axe, centre, cercle,conjonction, constante, corps, couronne, coordonné, distance, espace, équation, hémisphère, méridien, module, orbite, phase, plan, pole, polaire, quadrature, rotation, unité, vitesse, zone ;

5.logique :

algorithme, analyse, arc, axiome, calcul, cercle, classe, conclusion, condition, conjonction, constante, démonstration, différence, discontinuité, distributivité, division, équivalence, figure, fonction, hypothèse, implication, matrice, négation, postulat, relation ;

6.chimie :

analyse, base, combinaison, cône,constante, corps, décomposition, dispersion, équilibre, équation, élément, énergie, expérience, facteur, indicateur, inversion, période, principe, processus, rectification, symbole, substitution, transformation, vitesse ;

7.géographie :

aire, axe, base, calotte, centre, cercle, champ, cône,courbe, densité, différence,facteur, fluxe, forme, hémisphère, latitude, longitude, méridien, parallèle, réseau,sphère, zone ;

8.médecine :

unité, système, résonance, processus, opération, inversion, injection, équivalence, disque, corps, contrôle, complément, champ, cylindre, centre, calcul, base, adhérence, accès ;

9.biologie :

absorption, analyse, aire, calotte, cylindre, classe, code, complément, contrôle, corps, dynamique, divergence, division, élément, expérience, fluxe, indice, matrice, sélection ;

10.droit :

absorption, centre, code, conclusion, condition, continuité, contrôle, corps, divergence, égalité, loi, nome, preuve, rapport, substitution, valeur.




 
 

[1] La raison pour laquelle on a choisit les mathématiques est double : d’une part, parce qu’elle s’avèrent très productives pour l’étude qu’on se propose, d’autre part, parce qu’elles représentent une discipline qu’on maîtrise bien.

[2] v. Bidu-Vranceanu, Angela; Toma, Alice (2001) – Lexic stiintific interdisciplinar, EUB, Bucuresti

[3] Moingeon, Marc; Berthelot, Jacques (dir.) (1990) – Le dictionnaire ne notre temps, Hachette, Paris ; Péchoin, Daniel ; Demay, François (1994) – Le petit Larousse, Larousse, Paris.

[4] v. Moirand, Sophie (2001) – Les politiques médias et les discours de spécialité, Cediscor, Paris.

[5] Foucault, Michael (1969) – L’archéologie du savoir, Gallimard, Paris.

[6] v. Rastier, François; Cavazza, Marc; Abéillé, Anne (1994) – Sémantique pour l’analyse de la linguistique à l’informatique, Masson, Paris, p. 61-64. Rastier considère le domaine un type de classe lexicale située, en descendant, après le taxème, mais avant le champ et la dimension. « Chaque domaine est lié à un certaine type de pratique sociale déterminée. Les indicateurs lexicographiques, comme chim (chimie), ou mar (marine) sont des indicateurs de domaine ». Il y a deux teste pour identifier un domaine : 1) dans un domaine la polysémie lexicale est absente ; 2) entre les unités d’un même domaine il n’y a pas de lien métaphorique. v. aussi F. Mazière (1981 – II) – Le dictionnaire et les termes, in « Cahiers de lexicologie », vol. XXXIX , p. 79-101.

[7] Il faut préciser que les deux concepts qu’on utilise, interdisciplinaire et migrateur, ont la signification générale , « qui appartient à deux ou plusieurs domaine” , mais la différence est donnée par l’orientation de la circulation des termes , l’aspect statique de l’appartenance des ter mes scientifiques aux différents domaines ou, respectivement, l’aspect dynamique du passage des termes d’un domaine à l’autre.

[8] Kleiber, Georges (1999) – Problèmes de sémantique. La polysémie en questions, PUS, Septentrion.

[9] Le postulat de la terminologie de Wuster à Lerat et Cabré est le mono- sémantisme des termes de spécialité.

[10] Marcus, Solomon (1970) – Poetica matematica, EARSR, Bucuresti, p. 34-35.






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